La nuit est tombée sur Louvain-La-Neuve. Je suis cloîtré dans ma voiture, tous feux éteints, à l’arrêt sur un parking sombre, quand quelque chose fait vibrer le verre posé dans mon porte-gobelet. Une seconde secousse, plus importante, accompagnée d’un bruit sourd, parcourt le sol et m’extirpe de ma torpeur. Puis une troisième. La surface de ma Triple Hop s’agite et se part d’ondes concentriques au rythme de ce qui ressemble à des pas de géant… Boum… Boum… Boum… Quelque chose de gros – de très gros – approche…

Le Tyrasonore Rex ouvre ses portes.

Trois groupes de carnassiers du rock se sont succédés sur la scène du Salmigondis pour cette première soirée de la troisième édition du T-Rex. De véritables prédateurs aux riffs acérés comme des lames de rasoirs…

C’est The Unleaded 91’s qui ouvre les festivités. Pendant près d’une demi-heure, le quatuor nous balance au visage un rockabilly – c’est ainsi que le groupe se présente – puissant et agressif, qui envoie vraiment du lourd. Mais est-ce encore vraiment du rockabilly? On est assez loin en tout cas de l’ambiance ”banane et contrebasse“. Mais qu’importe, le tout sonne comme une grosse claque et les membres du groupes sont vraiment très chauds ! Le chanteur nous transmet toute son énergie et ne se laisse pas handicaper par son bras dans le plâtre. Mention spécial d’ailleurs pour celui qui le remplace à la basse, un invité qui ne fait pas partie du groupe habituellement et qui est pourtant à fond dedans. On a du mal à le quitter des yeux… Finalement, le tout peut paraître un peu brouillon mais, en fait… on s’en fout ! Ca claque comme il faut, là où il faut. Le set était cependant un peu court et on aurait bien repris un ou deux morceaux de cette bonne surprise et de sa fougue si communicative.

Vient ensuite Heautontimoroumenos, le groupe au nom qui ne s’écrit pas, mais se copie-colle. D’entrée de jeu, on nous annonce un incroyable voyage au coeur de leur ambiance sonore, pleines de loops et d’effets en tout genre. L’intro du concert nous prépare à une véritable fable antique, une voix pré-enregistrée nous murmurant un monologue qui semble flotter entre deux eaux, à travers l’écran de fumée et de lumière qui noie la scène. L’atmosphère nous happe, se faisant pesante, et s’agrémente de sons distordus et de lights bien calibrées, aux saveurs de quizzar. On a l’espace d’un instant l’impression d’être “clignoté à mort par Buzz l’Eclair”. Au final, le groupe nous entraîne dans un rock progressif qui a beaucoup de personnalité, mais qui se complait parfois un peu trop dans une lancinance qui manque de rebondissement. On retiendra les complaintes lugubres du chanteur qui, de temps à autres, vous descendent délicieusement dans les tripes.

Le troisième et dernier groupe de la soirée est sans conteste le plus pro ! Thyself est une formation composée intégralement d’ingénieurs du son. Pas étonnant donc de les voir jouer à merveille avec les effets sonores, tous parfaitement léchés et millimétrés. Leur set est varié, alternant avec brio subtilité et agressivité. Il en ressort un rock alternatif très agréable et des morceaux agencés au poil. Pour reprendre leurs mots, c’est un peu comme si «Thom Yorke et Kurt Cobain faisaient à la fois l’amour et la guerre». Je n’irais peut-être pas jusque là, mais il faut reconnaître que c’est bien dit !

Côté organisation, il n’y a presque rien à redire ! Entre le bar extrêmement bien fourni en bières spéciales de qualité (dans notre plat pays houblonné, il s’agit là d’un argument non négligeable), les tarifs raisonnables et l’entrée à petit prix (3€ avec un ticket boisson), difficile de ne pas y trouver son compte. On saluera aussi le travail d’agencement effectué dans la salle méconnaissable, entièrement drapée de noir. Ce qui permet au public de se sentir mieux cerné et focalisé sur le spectacle et, semblerait-il, a une incidence positive sur l’acoustique pas toujours folichonne de la Salmigondis. On aurait peut-être aimé que le thème visuel si attrayant sur les affiches se retrouve dans la déco des lieux. Passer Jurassic Park sous le rouleau-compresseur du pop art et de la fluo attitude serait peut-être un concept à creuser.

Pour conclure, on a affaire ici à une orga bien rôdée, huilée comme il faut, qui nous offre une soirée concerts simple et efficace, comme on aimerait en voir plus souvent. Cette année, Sarcastic Mouse Production s’est greffée à l’équipe habituelle du Tyrasonore, et le moins qu’on puisse dire, c’est que le collectif fait indéniablement du très bon boulot !

Nous n’avons malheureusement pas pu être présents vendredi pour le “Météor Day” et sommes conscients que ne couvrir que le premier jour du T-Rex, c’est un peu comme réduire ses connaissances paléontologiques à “Petit-pied”, mais promis, on se rattrapera l’année prochaine ! En attendant, nous y avons passé une excellente première soirée !

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