On ne l’avait pas vue venir, qu’elle était déjà là : la dernière des quatre journées folles d’Esperanzah! Sans doute la journée la plus familiale, tant des dizaines de têtes blondes ont envahi la place. Le jour de la survie aussi, les festivaliers ont déjà bien puisé dans leurs réserves et tentent de jouer l’économie.

Mais au vu de la programmation, pas sûr que cela soit gagné, quitte à finir crevé. Même si le festival possède ses quelques oasis où se reposer en toute quiétude. Comme Radio Bistro, véritable dancing qui fait se trémousser le peuple de l’herbe à la tombée de la nuit et des derniers concerts, le Bistro le plus sympathique de la région sait varier les plaisirs et s’offre une tendre valse, celle d’Amélie. Ambiance câlins dans le jardin.

Chaleur et pluie font bonne musique

Mais les choses sérieuses ne font que commencer, comme avec les catalans (Espagne) de Txarango, survoltés, qui, malgré la chaleur pesante, ont assuré un spectacle tout en énergie et en rythmes dépaysant foule et campagne floreffoise (Esperanzah!, on en profite à 10 kms à la ronde, tant pis pour les grincheux). De quoi conquérir le public, qui s’est vite attaché aux sympathiques hispaniques à en voir la ruée vers le stand de leur merchandising.

Un peu plus tard, c’est sur les hauteurs de l’abbaye que les festivaliers ont pu admirer la solaire Ayo. Après… une pluie orageuse et bien nourrie qui a fait fuir les festivaliers en quête d’abris. De courte durée, mais de quoi semer la désolation dans les regards et les pleurs d’un groupe de personnes à mobilité réduite, aidées par des scouts, qui se réjouissaient temps de vivre cette journée en « terre du Monde ». Ouf ! La pluie ayant disparu aussi vite que ces dégâts, comblés par l’enthousiasme festivalier. Après la douceur de la chanteuse nigério-allemande et de sa voix « soul-ante », place aux imparables Fauve, véritable phénomène que ce collectif d’artistes en tous genres (de la musique, bien sûr, au web en passant par la vidéo) devenu phare en un temps record. Et au vu du nombre d’adeptes du groupe parisien, t-shirt dédié et signes différentiels (la marque du groupe) sur le visage, le phénomène n’est pas près de s’atténuer. Avec un concert qui s’annonce inédit, par la voix du chanteur : « J’ai un peu trop forcé hier, mais on ne va pas s’abattre. » C’est donc avec une voix étonnamment grave par rapport aux pistes de l’album (mais les transcendant et les révélant encore plus punchy, encore plus touchant), qu’il chantera avec brio les titres, hauts en couleurs et « Hauts les coeurs », remerciant les Vieux Frères et les Belles de leur compréhension (« Vous êtes gentils »). Quelques secondes suffisent à l’immersion totale dans un univers, riche en couleurs et cinématographique.

Dernier coup de griffe en final bouleversant

Impossible d’avoir une vue d’ensemble, l’œil est sans cesse attiré aux quatre coins de la scène : par les clips diffusés en arrière-plan, les gestes compulsifs des quatre musiciens ou par « Fauve-Chanteur » dont la démarche sur scène est aussi rapide que le débit inimitable de ses paroles. Le tout sur une musique alliant rock, ambient et hip-hop et une attitude de proximité par rapport au public, faisant participer celui-ci comme sur le sublime 4000 îles convoquant les quelques milliers de spectateurs à se combiner dans un formidable coeur, en renfort des voix quelque peu usées du groupe. Et la magie n’en est que plus grande pour donner le meilleur concert du festival. Un festival par lequel Fauve est heureux d’avoir été invité : « Quel cadre magnifique, merci de nous avoir fait participer à cette aventure, merci aux bénévoles sans qui tout ça ne serait possible ». Avant d’ajouter qu’ils allaient clôturer avec deux reprises : une de Tal, une autre de Brel. Une blague qui n’empêche pas le groupe de finir sur les formidable Blizzard et Nuits Fauves. Peu adepte des photos (et fidèle à leur religion de l’anonymat), Quentin, le chanteur, vient néanmoins à la rencontre de son public, expliquant les raisons de son manque criant (mais loin d’être désagréable) de voix et repoussant le steward, érigé en barrière humaine, d’un « Il n’y a aucun souci, c’est super sympa de leur part».

La passion Fauve retombe petit à petit avant un dernier tour de scène, un virage électro réussi avec  les Français d’High Tone pour emmener la foule dans un trip extra-terrestre avant qu’ « hippies, retour maison » et qu’Esperanzah! 2014 se referme sur une fantastique dernière journée. Sur ses 4 jours, le festival abbatial a accueilli plus de 46 000 visiteurs, un beau succès qui fait sourire les organisateurs de ce festival résolument convivial et transgénérationnel.

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