N’y allons pas par quatre chemins, enlevez les œillères, ouvrez grandes les mirettes, et prêtez deux oreilles attentives: Feu! Chatterton est sans doute le groupe de rock en français qu’on attendait depuis très longtemps. Ou plutôt qu’on n’espérait plus. Les prix se succèdent d’ailleurs pour le quintet parisien: remarqués aux Francofolies de la Rochelle, Prix Felix Leclerc, Prix Chorus, etc. La liste présage d’être encore longue!

Et pourtant, avec un nom comme celui-là, il fallait sans doute s’y attendre: Chatterton, Thomas de son prénom, poète maudit et suicidaire du XVIIIème siècle, symbole pour les romantiques.  Le nom de groupe serait du à la peinture d’Henry Wallis, La mort de Chatterton. Peu importe, Feu! Chatterton est , et c’est sans doute l’important. Le feu, ici, n’est donc pas brûlant, mais bien, d’une froideur mortelle et magnétique. Comme les fantômes qui se baladent et s’imposent au fil de cet EP flamboyant: les ombres de Bashung, de Gainsbourg, des dandys disparus (le chanteur moustachu, Arthur, presque intemporel, cultive ce style dans l’apparence mais aussi la philosophie), les revenants du Costa Concordia aussi (“Du ciel tombent des cordes, faut-il y grimper ou s’y pendre?“).

Des poètes, voilà ce qu’ils sont, de grande classe qui plus est. Les références s’imposent: il y a du Ferré, du Noir Désir, aux deux fantômes précédemment cités. On pense à Fauve un peu pour la démarche, pour cette remise au goût du jour. À Arnaud Fleurent-Didier sur le piano d’À l’aube. Ajoutez à ça une dose indéniable de talent et d’innovation, de rétro mais aussi de regard sur notre époque. Dès la première piste, Côte Concorde qui offre la contemplation très poétique du naufrage du Costa Concordia. Happé au fil des titres, diablement bien foutus et enveloppés d’une musique entraînante et crescendo, on se retrouve submergé par ces voltigeurs des sons et des mots.

On retrouve aussi une puissance d’interprétation, une force qu’on s’est fourvoyé à chercher dans les “talents” français de la jeune génération, sans réel succès, si ce n’est quelques exceptions. Quelques nuances vocales couleur soul viennent aussi ponctuer le tout, dans les cris vigoureux du chanteur. Et des textes à se damner, jouant judicieusement des répétitions de certaines phrases plutôt que des refrains à l’infini, comme c’est la norme dans beaucoup de chansons sans âmes calibrées pour les radios. Chaque chanson est un petit chef d’oeuvre, des bijoux dont il faudra prendre soin, comme autant de promesses des beaux et grands jours.

Alors maudits, les poètes? Ceux-là, nous aurions tendance à les bénir! À suivre, assurément!

Feu! Chatterton, EP disponible dès le lundi 8 septembre en digital et en vinyle et cd

Et en bonus, une reprise d’un groupe belge culte

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