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Marie Warnant est ce que l’on peut qualifier une artiste en résistance.
Belle, très belle même. Fan de mode, icône et muse de créateurs, la bruxelloise d’adoption est de retour depuis quelques mois avec son troisième album Nyxtape. Concept musical qui fait appel à des techniques atypiques et qui fait référence à ces cassettes de compilations qui se vendaient sous le manteau dans les stations-services américaines dans les années 60.

Scenes belges a rencontré l’interprète de l’incontournable Bruxelles, qui nous a expliqué comment se passe cette nouvelle aventure et quel regard elle pose sur l’univers musical francophone belge actuel.

Ce qui est incroyable avec Marie, c’est qu’une tasse de thé, un fauteuil douillet, une question et elle se lance dans une longue explication passionnée. Nous on écoute, on apprécie sa sincérité et son audace.

Scènes belges : Marie, votre disque est dans les bacs depuis quelques mois. Où en êtes-vous aujourd’hui de ce projet complexe et original ?

Marie Warnant : On a un bel accueil du public. On a des dates qui arrivent où le public nous suit. Par contre du point de vue commercial, il faut avouer qu’on subit une petite déception. Les radios ont décidé de ne pas passer le disque du côté francophone, on a donc une visibilité assez réduite.
En Flandre, les titres tournent. Les programmateurs s’arrêtent à la musique sans réfléchir forcément à la personne qui présente le projet, son implication, le personnage qu’elle peut représenter. C’est plus simple de vivre un projet comme celui-ci dans ce contexte-là.

Ce disque est très produit. Je me suis posée, j’ai essayé de faire de vrais choix. De créer un univers. Le souci c’est qu’en Belgique, le soutien est assez faible. Dans des capitales comme Berlin, on donne beaucoup plus sa chance à des projets très artistiques et peut-être moins commerciaux. En Belgique, il y a globalement le système des maisons de disques et des relations qu’elles peuvent entretenir avec les média. Personnellement, j’ai choisi de faire un travail beaucoup plus home made, de ne pas trahir mes envies. Bien entendu, je suis un peu déçue de voir qu’on ne donne pas sa chance à ce disque mais finalement je vois que sur scène le public adhère.

SB : Aujourd’hui, vous en êtes où dans le développement promotionnel de l’album ?

MW : Sur ce disque, on va travailler sur plusieurs axes. Là, on est sur la sortie du single « Make Love » dans une version très travaillée et multiformes. On va s’associer avec Jean-Paul Knott le styliste bruxellois qui m’est fidèle depuis de longues années. On essaie de faire vivre ce disque longtemps, de le développer encore et encore, de le modeler. Je pense que la musique n’est pas que le disque. La création est beaucoup plus large que sortir un disque et le défendre sur scène.

SB : On te sent décomplexée et beaucoup plus sure de toi. Comment te sens-tu aujourd’hui?

MW : Créer c’est être libre et libérée. Personnellement, j’ai dépassé ce que j’avais de freinant. Aujourd’hui, je suis comme je suis. Je ne peux pas essayer d’être une autre. J’ai quitté le rapport de séduction. Par exemple, la pochette du disque est volontairement un visuel qui n’est pas une photo de moi. Je veux garder une liberté artistique qui m’impose aussi parfois de passer à côté de certains supports faciles. Sur le deuxième disque, j’ai fait beaucoup de concessions mais je n’y croyais plus au final et on a bien vu que cela n’a pas marché. Je préfère m’écouter, prendre des risques et les assumer.

Travailler aussi sur ce disque m’a responsabilisée, m’a redonné confiance. Rebondir sur ce deuxième album qui avait moins marché imposait de se mettre en danger. De plus, être un électron libre dans ce milieu ne plaît pas. J’essaie de ne pas trop être touchée par les diktats.
Sur ce disque, on a un bon retour du public, de la presse. C’est un bonheur de voir que mes choix sont compris par ceux à qui le disque est destiné. J’ai fait cet album pour le public et pour moi aussi. J’essaie de garder ma ligne de conduite. Personnellement, je suis revenue à de la consommation de musique sur vinyl. Ça prend du temps, il faut accepter que ce soit plus lent et c’était ma démarche sur Nyxtape. Un univers construit et détaillé qui se découvre lentement, il faut rentrer dedans pour le comprendre. Le disque a pas mal de succès auprès des musiciens, ça me rassure et ça me conforte dans l’idée qu’il y a encore une place pour de la chanson française différente de celle qui est bombardée à la radio. Je recherche l’authenticité, l’artisanat musical, le do it yourself, la rencontre du public. Voir que le public vient écouter le disque sans avoir été assommé avec des passages radio c’est un bonheur. Après, il est évident que vendre plus serait confortable. Pour le moment j’ai le besoin de faire de la musique comme ça, de ne pas me perdre.

Marie Warnant sera le 11 octobre au jardin de ma sœur dans le cadre du festival Francofaune. Sur scène, elle propose un set original et d’une grande finesse. A ne pas rater.
Nyxtape est toujours disponible sur les plateformes de téléchargement et chez les disquaires.

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