Après deux albums aux sonorités métissées, « Hotel Impala » en 2008 et « Kinshasa Succursale » en 2011, et une tournée colossale de plus de 270 concerts à travers le Monde, Baloji nous revient avec « 64 Bits And Malachites ». Un EP que nous avons eu l’occasion de découvrir sur scène et qui annonce les couleurs de son prochain album, prévu pour 2016.

Avec 64 Bits and Malachite, Baloji réussit le pari de construire un pont entre les sonorités musicales et culturelles du Congo et celles de son pays d’adoption, la Belgique. Ex-membre de Starflam ayant quitté le groupe suite à des divergences en 2004, MC Balo décide de se tourner vers ses racines quelques années plus tard, après avoir reçu une lettre de sa mère, qu’il n’a jamais connue. Enfant de la diaspora qui a grandi en Belgique dès l’âge de trois ans, il embarque alors pour un retour au source dans son pays natal. De cette expérience naît son premier album, Hotel Impala, qu’il produit pour la première fois sous le nom de Baloji et dans lequel il colore son rap et son slam de musique africaine. Il sort trois ans plus tard Kinshasa Succursale, qui explore encore plus loin l’univers musical du grand continent et fait la part belle à la Rumba Congolaise.

Mon père m’a dit, tu veux faire du Bisso Na Bisso?

J’ai dit “t’as rien compris papa”, et j’ai continué ma route.

On m’a dit “tu te prends pour qui”? Tu crois que tu vas faire de l’electro?

Mais j’ai continué ma route.

On m’a dit qu’on ne pouvait pas chanter à l’international en rappant en français.

Mais on a fait le tour du monde avec ce band.

Et aujourd’hui on vient vous présenter le blues de la brousse.

Mercredi dernier, c’est sur les planches du Botanique que le “negropolitain” (ainsi se présente-t-il lui-même) étalait en live 64 Bits and Malachite, à l’occasion de son premier concert en Belgique depuis 2011. Nouvelle relecture de son rap, dans laquelle il insuffle une bonne dose d’électro qui contraste avec l’afro-soul et la rumba à laquelle nous étions habitués, ce nouvel opus trouve son énergie et son inspiration dans les inégalités et les réalités sociales de ses contrées d’origine. Ainsi “64 bits” fait référence aux circuit électroniques des ordinateurs et des smartphones, composés notamment de métaux extraits des mines du Katanga, dans des conditions de travail déplorables. Tandis que la malachite est la seule pierre verte issue de la terre du Congo dont la valeur monétaire est plus faible que la valeur traditionnelle, et ne servant qu’à fabriquer des bijoux de pacotille.

baloji-64-Bits-and-Malachite-capture-8-715x269-620x269À travers des textes enivrés de métaphores, c’est toutes les contradictions, les tensions, la misère, les exploitations, et les instabilités politiques du pays que Baloji met en lumière. Condamnant entres autres l’obsolescence programmée, l’alcoolisation des âmes et l’ironie d’une réalité dans laquelle les denrées les plus abordables en RDC sont la bière et les unités téléphoniques, les textes sont portés par un flow lent, quelque peu linéaire et mécanique, saupoudré d’electro-beats lourds et de quelques teintes afro-américaines. Un peu difficile à apprivoiser lors de la première écoute, mais soutenant parfaitement l’ambiance lorsque l’on s’immerge dedans.

Ils appellent ça de la World Music parce qu’ils n’osent pas dire de la musique du Tiers Monde. Ceci n’est pas de la World Music, c’est de la musique de chez nous !

Malgré le ton grave des sujets abordés, c’est un show endiablé, joyeux et dansant que nous a offert l’artiste dans la Rotonde du Bota. Sur scène, Baloji déborde de fougue, de classe et de charme. Armé d’une énergie sans faille, il se déhanche pendant près de nonante minutes, accompagnant les rythmes de batterie de coups de pied aériens ou febondissant comme une sauterelle sur la scène. Mais Baloji est loin d’être seul sur les planches et il ne l’oublie pas, mettant constamment en valeur ses musiciens, allant jusqu’à s’éclipser pour leur laisser la place qu’ils méritent. Et qu’ils méritent franchement tant leur prestation rend le spectacle inoubliable !

Les deux premiers clips de 64 Bits and Malachite ont déjà été dévoilés : Capture, écrit avec Olu de Metronomy, et produit par Thomas Azier, qui a notamment collaboré avec Stromae, et Unité & Litre, dans lequel on retrouve les Congolais Petite Noir et Muanza, et dont la vidéo nous permet d’admirer Jolie Ngemi, la danseuse de PARTS.

Baloji, artiste complet aux multiples facettes, ne compte pas s’arrêter en si bon chemin puisque ses tiroirs regorgent d’autres projets. « J’ai de quoi remplir deux albums et demi, confie-t-il à nos confrères de Frontstage. J’ai également écrit un scénario pour un long-métrage que je compte réaliser moi-même, parallèlement à la composition de la musique du film. Ça s’appellera Avenue Kaniama, du nom d’une avenue à Lubumbashi où je suis né. Depuis que je suis gamin, le cinéma me passionne et j’ai d’ailleurs réalisé moi-même mes derniers clips. En 2016, j’espère monter une tournée africaine. J’ai aussi un projet d’exposition de photos, de films et de textes sur le thème de 64 Bits and Malachite. »

On attend donc cela avec impatience, et d’ici-là, n’hésitez pas à vous jeter sur “64 Bits and Malachite” !

www.baloji.com

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