Hans Zimmer. Combien de frissons et d’émotions cinéphiles ce seul nom peut-il susciter. Compositeur aussi intransigeant que génial, Hans Zimmer a amené un peu de la magie émotionnelle et musicale des plus grands films depuis trente ans, à Bruxelles, au Palais 12. Un rendez-vous au sommet.

Hans Zimmer - Live on Tour (2)

S’il y a bien quelque chose de plus imparable que le flux forcé et continu que nous balancent les radios, ce sont peut-être les musiques de films, ces formidables bandes-sons rappelant des images, des visages, des moments de bravoure dont seul le Neuvième Art a le secret. Certains compositeurs font des soundtracks qui ne survivront pas à la vision du film tant elles y sont incorporées, tant elles n’ont de vie que s’il y a des images pour les sous-tendre.

Puis, il y a une autre catégorie de compositeurs, plus rares. Ceux qui, non content de mettre de la musique sur quelques dizaines de minutes de pellicules, font de leur art une vraie bande-son de la vie avec des morceaux, des suites qui accompagnent des années durant ceux qui les ont écouté une fois. Il y a eu Morricone, John Williams. Depuis trente ans, il y a aussi Hans Zimmer. Depuis son Rain Man, la carrière de cet Allemand naturalisé Américain n’a fait que prendre de l’altitude, multipliant les grandes musiques pour, souvent, de tout aussi grands films. Avec un art si maîtrisé que désormais chaque morceau que ce génie compose n’est pas loin de rentrer, de s’ancrer directement dans les mémoires. Du Roi Lion à Batman, de Gladiator au flamboyant Pirate des Caraïbes. Fort comme un Rock, pas loin d’être le dernier Samouraï, « Prodigy » à part entière, Sherlock Holmes de la perfection, Petit Prince devenu roi depuis des lustres, oui, he’s a pirate, a cowboy, a super-hero, Hans Zimmer est un génie transgénérationnel.

Hans Zimmer - Live on Tour (5)

Il n’y a qu’à voir la foule d’âges que ses concerts rameutent. Car, oui, Hans Zimmer avait choisi Bruxelles et son Palais 12 pour arrêter la grande tournée qu’il vient d’entreprendre. Bien sûr, celui qui a préféré la baguette et le piano à la caméra pour mettre des images dans la tête des spectateurs n’était pas venu seul. À l’instar d’Ennio Morricone, il y a quelques mois, le maître allemand avait déplacé beaucoup de musiciens. C’est avec son band complet, augmenté d’un orchestre supplémentaire et de la Chorale de Bruxelles (une première) qu’Hans Zimmer s’est réapproprié ses titres et suites, film par film. Une sélection drastique dans une carrière hallucinante où tous les goûts se retrouvaient, dans un crescendo haletant. Dès le medley initial, le ton est donné, ce sera rock’n’roll, puissant, salvateur. Maman, on a coupé l’image. Oui et ce n’est pas grave, porté par cette musique d’anthologie, la musique porte les images, les souvenirs qui rejaillissent de plus belle tout en jouant le jeun d’un blind test pas trop compliqué.

Driving Miss Daisy, Sherlock Holmes et son piano qui déboîte, Madagascar, Crimson Tide. Ça commence plutôt bien. Hans enlève déjà son veston, ça donne chaud de donner du bonheur aux gens. D’autant que le compositeur que la légende a précédé (et qui dit qu’il est exigeant et pas toujours facile à vivre, une fois au boulot) est bienveillant à l’égard de ce public qu’il chérit. Il loue ses musiciens et introduit ses morceaux à l’aide d’anecdotes souvent marrantes. Puis, c’est le premier fait d’armes, avec une succession de musiques qui réveillent quelques belles émotions de cinéphiles. Anges et Démons, Gladiator, Da Vinci Code. Ça joue fort, ça joue bien et l’ensemble qui accompagne ce soir Hans Zimmer rend à sa musique son côté dantesque et riche. Hans, lui, oubliant son rôle de chef d’orchestre et ne dirigeant que peu son orchestre, passe du piano sur lequel il s’est tant appuyé pour composer à la guitare électrique, au banjo aussi. En passant aussi par la… batterie le temps de quelques coups de semonce.

Hans Zimmer - Live on Tour (3)

Puis, c’est une voix bien connue qui nous ramène des milles îles d’émotions où nous étions partis. Une voix forte, emblématique, “Nants ingonyama bagithi Baba“, nous voilà entrés dans la musique oscarisée du Roi Lion avec la voix originale de Lebo M. Plusieurs fois, on a les poils sur cette suite où culminent les plus belles musiques de ce Disney qui nous fait rugir de plaisir. Et les lumières ne font que souligner la force de la musique. On continue dans le Disney d’ailleurs, avec le tant attendu Pirate des Caraïbes. Et dans ce pot-pourri, on devient tous des pirates sur les hymnes flibustiers de Zimmer. Car oui, dépassant le Neuvième Art, ce ne sont rien d’autre que des hymnes fédérateurs qu’Hans a composé au fil de sa carrière.

Et tant qu’à parler d’hymnes, après l’entracte bien méritée après tant d’émotions, c’est le goût de l’épique qui nous est donné : La Ligne Rouge, Man of Steel et l’inévitable succession de « tubes » composés pour Christopher Nolan. Hans Zimmer reprend même un morceau impérial du pourtant très passable Amazing Spider-Man 2, prouvant qu’il est capable de donner à une musique l’aura qu’un film a été incapable de lui donner. Le morceau s’appelle Electro et est bien choisi tant l’orchestre électrifie l’assemblée sous les détonations et les éclairs de lumière. C’est presque du hard-rock et c’est peut-être la seule fois où la pauvre scénographie (seul bémol de ce concert, et d’autant plus incompréhensible qu’il s’agit de musiques de films et qu’une autre mise en valeur aurait été possible) est à la hauteur. Ça crépite de partout pour initier une voie royale amorçant le jubilatoire The Dark Knight. Hans Zimmer prend la parole, un peu solennelle pour évoquer la mémoire d’Heath Ledger et la tragédie à laquelle fut confrontée l’équipe du film. Le musicien en profite pour faire le parallèle avec les événements horribles de Bruxelles. « Bruxelles, nous sommes là avec toi, nous te protégeons, nous jouons pour toi. » L’émotion est palpable et les milliers de personnes regroupées sous l’égide du Palais 12 sont debout, comme un seul homme.

Hans Zimmer - Live on Tour (4)

On est proche de la fin, mais le rappel tonitruant rappelle bien vite Hans Zimmer et ses musiciens pour un dernier morceau, attendu par plus d’un. Time, issu de la BO d’Inception. Un final en douceur porté par un piano délicat, une conclusion admirable pour un concert trépidant, énergique, profondément émotionnel. Et si Hans Zimmer confiait, il y a quelques jours, vouloir arrêter les musiques pour super-héros, on comprend mieux pourquoi: il en est devenu un!

Please follow and like us:
error
fb-share-icon