Un flow aussi classe que calme, posé avec une voix grave et chaleureuse sur des instrumentaux empruntant résolument au jazz et à la soul, c’est ce qu’évoque la musique de Loyle Carner pour celles et ceux, nombreux, qui ont pu être charmés par les deux albums du jeune londonien. Mais ce que ce dernier est venu montrer à la salle comble de l’Ancienne Belgique, c’est qu’il est aussi, et avant tout, un rappeur hors-pair, et une formidable bête de scène.

© CPU – Bert Savels

Lundi 16 décembre, 19H10. La salle de l’AB se remplit doucement. Sur la scène le trio de Lucy Lu offre avec humilité et sympathie sa pop rock, aux accents hip-hop et électro. Le public, curieux et attentionné, se fait de plus en plus nombreux devant l’estrade. Quand le groupe quitte celle-ci avec gratitude, après une étonnante reprise du tube One Thing d’Amerie, la fosse est déjà bien remplie.

Il faut dire que les gens sont impatients, qu’ils attendent depuis deux semaines la venue du rappeur, qui a reporté son concert pour cause de maladie, et que, comme à la date prévue initialement, la billetterie affiche sold-out. Alors quand Loyle Carner fait son apparition, soutenu par des basses percutantes, et un jeu de lumière aussi épuré qu’efficace, la salle rugit. Large t-shirt blanc et pantalon de jogging, accompagné d’un bassiste, d’un claviériste et de son dj Rebel Kleff, l’Anglais lâche ses premières rimes avec une énergie qui contraste avec le ton posé de ses albums. Arpentant inlassablement la scène, dansant, sautant, exhortant la foule à lever les bras en l’air, Loyle Carner enchaîne les morceaux, infatigable. Il remercie le public d’être là, malgré le report du concert, ainsi que les nombreux artistes en featuring sur ses albums, non sans humour.

© CPU – Bert Savels

La basse fait vibrer les cœurs, les beats bouger les têtes. Loin de la démagogie des pogos à outrance qui inondent les scènes de rap, Loyle Carner est un rappel de ce qui fait l’essence du hip-hop. Il remet la figure du rappeur, en tant que créateur de textes qui le dévoilent (à l’instar de son morceau Still, qui raconte les difficultés de son métissage) et dépositaire des qualités techniques nécessaires pour les déclamer avec force, et réaffirme avec énergie que cette seule vertu est déterminante. C’est à travers elle seule que le rappeur mérite l’approbation du public, et le moins qu’on puisse dire, c’est que ce soir-là, le public la donne sans retenue à Loyle Carner, qui s’en délecte, s’en nourrit, et en redouble d’énergie à chaque morceau.

Quand on croit atteindre l’apogée, résonnent les notes du saxophone de l’immense tube Ain’t Nothing Changed. Le rappeur et son public, dans une dernière fièvre de communion, reprennent le refrain en chœur pour une apothéose accentuée par la lumière dorée qui envahit la salle. Après un rappel court mais déchaîné, il quitte la scène, encore étonné de son effet sur le public, ravi de ce moment passé avec nous.

Setlist

Ice Water
You Don’t Know
Stars & Shards
The Seamstress
Angel
Damselfly
Florence
Dear Jean
Deloseil (Brilliant Corners)
No Worries
October
Looking Back
Still
Ottolenghi
Loose Ends
Nothing Changed

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