Ça y est c’est reparti comme au bon vieux temps ! L’édition 2022 des Nuits du Botanique édition reprend sa place initiale dans le calendrier pour en quelques sortes ouvrir la saison des festivals. Le festival retrouve également sa forme habituelle avec une véritable avalanche de concerts qui vont se dérouler dans les salles et le parc extérieur du Botanique, tout ça entre le 27 avril et le 16 mai. Un fameux marathon à savourer ! Et pour cette première soirée, les programmateurs ont déjà tapé fort avec pas moins de 10 concerts entre rap, folk, rock, électro et hip-hop.

Dans notre cas, nous avons fait le choix de nous intéresser aux deux concerts programmés dans l’Orangerie, la tête d’affiche étant occupée par les Namurois de GLAUQUE qui viennent présenter ce soir de nouveaux titres qui figureront sur leur premier album, attendu depuis bien trop longtemps maintenant.

Mais avant ça, ce sont les français de CABADZI qui ouvrent les hostilités sur le coup de 19h30. Ils sont là pour défendre leur dernier album en date (le cinquième déjà), “Burrhus”. Il fallait arriver tôt et nous avons bien fait : avec des textes et un humour grinçant comme Orelsan, mélangé à la mélancolie poétique d’Odezenne, le duo se distingue par des compositions variées où les influences se mélangent avec fluidité entre rap et électro principalement. On note aussi quelques sonorités plus asiatiques sur l’un ou l’autre titre. Pour assurer la rythmique, il y a une batterie dont son propriétaire se détache de temps à autre pour se lancer dans des instrus en forme de beat-box. Quelques bandes sonores et un ordinateur permettent d’envoyer aussi de gros beats bien gras aux airs de guitare électrique, quand ce n’est pas carrément un tempo de dancefloor comme sur le dernier titre du set par exemple. Même le vigile présent dans un coin de la salle y va de son pas de danse.

Au niveau des textes, il est question de la sur-connexion de nos sociétés modernes et du contrôle social implicite qu’elle engendre. Le flow est posé mais suffisamment rythmé pour donner du relief et un peu de nervosité à l’ensemble. On note malgré tout un titre plus sombre en cours de set avec des chœurs fantomatiques et inquiétants qui rend franchement pas mal en live. Entre les morceaux, on assiste aussi à quelques discussions un peu absurdes et décalées entre les deux gaillards, amenant un peu de légèreté festive au set. La scénographie est elle aussi assez travaillée avec des projections sur des panneaux transparents au rendu moderne et épuré. Ces panneaux sont déplacés au fut et à mesure du concert, faisant évoluer la configuration de la scène. Au bout d’une heure, le duo quitte la scène alors que le public réclame un rappel. Festival oblige, le timing est serré et le groupe ne peut malheureusement pas accéder à cette demande.

Revoir ensuite GLAUQUE monter sur scène nous fait plaisir, car honnêtement on a un moment pensé qu’on ne les reverrait plus au regard de leur long silence de ces derniers mois. Leur premier EP est en effet sorti il y a deux ans, suivi peu de temps après d’un second contenant des versions retravaillées des titres déjà existants. Revoilà donc le groupe de retour sur scène, quelques jours seulement après la sortie d’un nouveau titre, le massif “Plan Large”, à l’identité sonore bien affirmée et marquée.

Les premiers rangs sont bien compactes pour accueillir les 4 membres du groupe. Ce sont d’abord les 3 musiciens qui prennent place derrière la batterie et une impressionnante série de machines et claviers en tout genre. Ils entament le set avec une intro qui prend la forme de sombres nappes électrisantes nous rappelant le dernier album de Rival Consoles aux ambiance sombres, inquiétantes et lancinantes. On va retrouver à plusieurs reprises durant le set ces ambiances de froideur spatiale et métallique. Louis, le frontman arrive ensuite sur scène pour délivrer un premier couplet qui débouche sur un refrain carrément dansant. Dansant mais sombre. Le son et l’instru sont énormes et percutants, comme sur une piste de danse doucement oppressante, un peu suffocante… voir glauque.

Suffocant est un adjectif à aussi utiliser pour décrire le débit du chant et du rap du frontman de Glauque : C’est à fleur de peau, parfois d’une sensibilité absolue, parfois d’une rage totale, mais toujours avec un dégagement d’énergie impressionnant. Le chant prend aussi la forme d’un exutoire sauvage, comme sur le titre “Plane” qui s’achève dans un hurlement libérateur. Glauque a pris le temps de faire mûrir sa musique et ses compos. Louis a également élargi son spectre vocal en sortant des sentiers du rap traditionnel pour quelques moments plus mélodieux. Malgré une force de frappe sonore impressionnante, la musique de Glauque est hyper travaillée et captive un public dont le silence absolu de plusieurs secondes à la fin d’un morceau minimaliste mais tendu en démontre tout le pouvoir d’attraction.

Dans le public on retrouve aussi bien des amateurs de rock, que de rap ou d’électro. Et Glauque sait leur donner suffisamment de matière sonore à chacun d’eux pour les satisfaire. Et pour peu que vous ayez des goûts musicaux éclectiques vous êtes alors aux anges. Comme Glauque fait bien les choses, l’ensemble est d’une solide cohérence qui fait passer les musiciens de gros instrus syncopés et métalliques, presque indus, à des breakbeats et des synthés qui renvoient vers certaines compositions de Radiohead ou des albums solos de Thom Yorke, sans oublier des rythmes et sonorités plus synthétiques et dance. Lorsque certains passages sont plus vaporeux, c’est pour mieux percuter ensuite la foule avec avec des déferlantes électriques et électroniques. Le lightshow carrément massif et hyperdynamique se charge d’achever le travail en instaurant une atmosphère d’apocalypse intime et puissante.

Le titre joué en rappel vient finalement résumé à lui seul ce qu’on a vu et entendu tout au long du set : une première partie du titre à la mélancolie enfumée à la tension émotionnelle palpable avant un basculement brusque dans une tempête électrique. Glauque a mis notre patience à rude épreuve ces derniers mois mais ils n’ont clairement pas raté leur retour sur le devant de la scène. Il nous tarde d’entendre les versions studios de tous ces nouveaux titres joués ce soir. Avec ces nouveaux titres, le groupe a renforcé sa force de frappe sonore sans perdre la tension émotionnelle de ses textes. Les mélodies et arrangements de ces nouveaux titres feront le bonheur d’un public aux horizons musicaux multiples et qui appréciera de vibrer au son de grosses claques textuelles et musicales.

Please follow and like us:
error
fb-share-icon